La druide se rongeait les ongles, quoique griffes plutôt en l'occurrence, consciencieusement, l'animation de l'auberge de Valérias s'était peu à peu éteinte emportant avec elle l'enthousiasme de ses occupants. Même le tenancier de la masure se faisait des plus discrets en ce moment, sans doute occupé à fomenter un mauvais coût, et qui sait même peut-être préparait-il une augmentation astronomique du prix de la chambrée en toute innocence ! Il s'agissait de se méfier.. Un sourcil s'arcbouta tandis que le second se tassa sur lui-même..
« Où était donc passé le bonhomme? » « Où étaient-ils donc tous passés.. » Sa poitrine se fit brindille avant de se gonfler jusqu'à en mettre en péril son ceinturon doré.. Soupir de lassitude. L’aveugle et la folle en guenille devaient surement forniquer dans on ne sait quel coin peu recommandable, quant au duo de géomanciennes, les deux amis retrouvées, semblait s’en être allé, bras dessus bras dessous, dans une de ces promenades intemporelles. Les deux timbrés de Thanasius et Cebek eux aussi répondaient absents, mais les concernant mieux valait les savoir loin que tout près. La druide ne s’en inquiétait donc pas davantage que du nombre de ses puces. Liane, elle, s’avérait être occupée en ce moment à défendre, arme à la main, le sort des bastions encore teintés de rouge. Quant à la druide, pauvre femelle, elle errait en âme en peine, traînant les pieds sur les vieilles lattes qui faisaient office de parquet, sous les moqueries de quelques ivrognes, pas encore mis à la porte, qui pressaient Valérias de l’engager comme limeuse et cireuse de parquet.
La jeune femme faisait courir ses mains dans la masure, à défaut de s’élancer toute entière à l’assaut du monde extérieur. Oui, Ils courraient.. Tantôt sur les rampes de l’escalier de chêne.. Tantôt sur le vieux comptoir bourriné contournant les choppes qui attendaient là, hagardes, leurs futurs propriétaires.. Il courraient. Dévalant les dossiers de chaise criblés par l’œuvre journalière des termites, peinant pour se hisser en quête de chaleur jusqu’au sommet des chandeliers.. Ils courraient. Toujours plus vite, toujours plus en avant.. La druide se laissant emportée dans leur course.
« Grump’ !!! T’es là ? »Bien sûr qu’elle l’était, là. Ils s’étaient immobilisés, oscillant d’avant en arrière sur la vitre poussiéreuse, se demandant tacitement qu’elle pouvait bien être la raison de leur halte . La druide jeta un coup d’œil en coin à l’aubergiste qui était si soudainement apparu au bas des escaliers, interrogation implicite qui avait eu sa réponse toute aussi silencieuse. L’homme s’éloignait déjà. Les doigts rageurs se cabraient sur le verre dans un nuage de poussière.
Ils quittèrent finalement leur socle pour venir conquérir quelques pas plus loin la porte en bois, la terre sur laquelle ces chevaux unijambistes galopaient se fit fer, et bientôt tous virent s’accrocher sur une excroissance couleur rouille. Quelques piaffements d’impatience et enfin la porte tourna sur ses gonds.
Le rajustement de quelques mèches de cheveux, un sourire confiant et enfin le dénouement de ces nombreux jours passés à cavaler derrière ses propres doigts.
« Salut Bast’ ! »