Auparavant

Le voyage dura, et dura. Uniquement ponctué de monologue de la druide, et de quelques remarques acerbes lancées des deux côtés. Un voyage somme toute des plus agréables donc.

La neige avait précédé aux prairies verdoyantes. Le Sud enfin. Loin de se plaindre la druide avait échangé ces frusques fourrés pour des vêtements bien plus léger, et affriolant par la même occasion. Voilà bien un mois ou deux qu’elle s’était retiré du monde. A dire vrai sur Astaegan hormis deux trois ours et quelques yétis il n’y avait pas là de quoi converser gaiement autour d’une bonne chopine, a y avoir essayé un cuissot d’ours ce n’est guère causant. Bref la druide se faisait une joie de renouer prochainement avec le monde des hommes, ah les hommes.. Elle tâcherait de profiter comme il se devrait et surtout selon les opportunités plus ou moins intéressantes qui s’offriraient à elle. L’auberge étant tenue par Valérias, il y aurait au moins un homme dans la bâtisse. Tout n’était pas perdu assurément !

C’est ainsi que nouvellement accoutrée, et cela même sous les sifflements narquois de l’homme lui faisant office de guilde répondant au nom de Kleber, elle s’apprêtait à franchir le seuil de la fameuse Auberge. Consciente qu’arriver de nuit ne jouait pas en sa faveur elle réfléchissait à quelques paroles qu’elles pourraient lancées à l’aubergiste dans le but de se faire ouvrir la porte. Jouer de sa misère, oui voilà ce qu’elle ferait, cela ne changerait guère de ses vieilles habitudes. D’apparence commune, la druide espérait que celle ci cependant saurait répondre à ses attentes. Quittant le guide à quelques pas de la porte en lui promettant de lui offrir comme il se devait une chopine, elle s’avança tout en marmonnant intérieurement que le vieil aigri pouvait en faite aller se brosser. S’approchant à pas feutrés du seuil, elle plaqua son oreille droite contre la porte afin de se faire une idée de l’activité à l’intérieur, activité d’ailleurs s’il y avait ou non vu l’heure avancée. Elle parvenait à saisir quelques bribes de conversations, et l’entrechoc de verre lui annonçait que la nuit n’était pas finie. A elle de jouer !

Se raclant la gorge elle murmura quelques propos pour elle même répétant ce qu’elle prévoyait de dire si elle trouvait porte close, et d’une main assurée assena à la boiserie quelques petits coups répétés. Il s’agissait là de se faire entendre sans pour autant paraître trop insistante. En cas de refus elle comptait sur Kleber et sur ses relations avec le patron de la bâtisse pour lui assurer une couche.

Liane se promenait toujours aux alentours de l'auberge. Elle réfléchissait sur ce qu'elle devait faire ou non. Tenter de rejoindre cette nouvelle guilde était-ce réellement une bonne chose? La bonne décision? Avait-elle un avenir sur cette voie? Le chemin devait-il continuer ainsi? peut-être, peut-être pas . . .

-Reste calme. Réfléchis de manière posée et calme. Tu peux faire preuve de bon sens quand tu veux. Alors, par ou devrais-je commencer. Hum . . . Ouais voila, a peu près par la. Ensuite . . . ça, puis ça, et enfin ça. Bon, ils vont pas me laisser crever dans le froid quand même? Cette foutue porte va bien finir par s'ouvrir?. . . Parle correctement, si Papa t'entendait, tu ferais moins la maline. Pourquoi je parle à voix haute? Et de mon père qui plus est? . . . Complètement ravagée de l'intérieur moi. Bon, silence maintenant.

Elle s'en retourna vers l'auberge, voir si quelque chose avait bougé. Si ce n'était pas le cas, elle était bien décidée à faire demi-tour et s'en retourner à sa petite vie bourgeoise. Mais rien n'avancerait en agissant de la sorte. Il faut prendre ses pruneaux à deux mains, et faire ce qu'on a à faire. C'est parti. Agir puis pleurer vaut mieux que pleurer sans agir.

Arrivée au point de départ (devant la porte close), Liane parvint à voir deux personnes, qui se tenaient devant l'auberge. L'une un peu à l'écart, et l'autre l'oreille collée à la porte.

-Des espions? Des assassins? Des mendiants? Hum . . . Jles latte ou quoi? Nan mais nan, c'pas mon genre . . . Quoi que . . . Nan, approche toi, s'ils t'attaquent, tu ripostes, sinon tu les laisse fuir. Voila, tu vois que t'es intelligente?

Elle s'approcha, et lorqu'elle fut à distance respectable d'eux, elle leur annonça:

-Besoin d'aide peut-être?

C'était long, vraiment long, et une envie typiquement féminine avait crû en la druidesse. Seulement pouvait-elle se permettre de quitter son poste, imaginons que la porte s'ouvre furtivement pour se refermer aussi rapidement et qu'elle manque cette occasion. Certes non, elle se reprocherait de manquer une belle soirée voire même nuitée pour une envie pressante de la sorte. Se contractant, elle soupira et pria qu'on lui ouvrit dans les plus brefs délais. Après avoir jeté un regard en arrière pour s'assurer de la présence secourable du Guide, elle se tortilla, l'homme était toujours là affairé à secouer son attirail poussiéreux. Elle ne pouvait donc se permettre de s'éclipser ne serait-ce que quelques instants pour se soulager à l'arrière de la bicoque, il ne manquerait en effet pas de lui faire une remarque des plus déplacées, déjà qu'il louchait étrangement, sûrement intrigué par son attitude quelque peu suspecte.

"Respire, souffle.. Respire ! Souffle !", chacune de ses phrases étant suivies d'une respiration, ou d'un souffle selon.

"Pardon Petite Dame?"

"Rien, rien. Je m'impatiente voilà tout. L'est sourd votre compère ou quoi?" ne put s'empêcher de rétorquer la druide à demi mots. Tandis qu'elle collait de nouveau l'oreille contre la porte et qu'elle s'apprêtait à assener cette fois ci un bon coup de poing à la porte, une voix familière se fit entendre.

Se retournant le regard furibond vers le guide, pensant que de nouveau il la charriait, elle s'apprêtait à lui envoyer par la tête sa coiffe quand la voix reprit.

" Besoin d'aide peut-être? "

Haussant le sourcil droit, elle tenta vainement de mettre un visage sur les sonorités familières. Un soupçon d'arrogance. Une once d'espièglerie. Une femelle. Bien sûr Liane! Mais que fichait-elle ici? Tandis que la druide quittait le seuil de la baraque pour s'avancer vers la nouvelle venue afin de conforter son avis sur son identité, elle jeta un regard de biais vers Kleber, ce dernier avait mystérieusement disparu, du moins elle ne le distinguait plus du fait de l'obscurité.

" Liane c'est toi? Diable, que fiches-tu ici? Ah je vois, l'aubergiste est riche c'est cela, et tu n'as pas donné l'adresse à ta vieille copine? Traitresse! "

-Ne commence pas à hausser le ton sale sorcière, sinan jvais m'énerver et te latter la fiole et t'arracher les yeux pour en faire un breuvage de débilité!

Le fait de retrouver son amie avait rendu le moral a Liane. Elle se sentait plus sereine et soudainement heureuse. Ses épaules étaient dégagées de leur fardeau, sa conscience libérée de tout songe négatif . . .

-Je ne sais pas trop quoi dire en fait . . . Qu'est-ce que tu fais ici au juste? Tu me suivais en fait? Je sais que t'es fan m'enfin . . .

A la fois déboussolée et enthousiaste, elle comptait désormais sur l'assurance de son amie pour la sortir du mauvais pas dans lequel elle s'était engagée en venant ici. Liane n'osait pas prendre d'initiative, elle était une fille bien trop peureuse et trop peur sure d'elle même pour s'engager dans quoi que ce soit. Le tournant qu'elle venait de prendre était certainement le plus grand choix qu'elle n'avait jamais eu a prendre au cours de son existence, et le fait d'avoir choisi cela plutôt que de se contenter de la vie qu'elle menait attisait sa fragilité.

Sa sensibilité était à son paroxysme. Derrière son assurance dans son discours, elle était à fleur de peau. Elle suivrait son amie, et l'écouterait comme si ses paroles étaient celles d'un nouveau prophète, symbole de vérité et de savoir.

C'était elle, aucun doute possible. Diable finalement les conseils de l'autre cinglée se révélaient avisés. Que de beau monde déjà ! Souriant à la nouvelle venue, elle ne put s'empêcher de lui assener un bon coup de coude amical dans les côtes, qu'elle accompagna bien entendu d'un nouveau sourire éclatant.

"Bon ce n'est pas tout cela mais le guide m'a abandonnée semble t'il. Nous voilà donc toutes deux, dis moi que tu as une chambre dans cette auberge ?" lança t'elle à son amie d'un regard implorant.

Patientant le temps de la réponse de l'aquamancienne, elle soupira en regardant les alentours. Elle avait toujours envie de se soulager, et les émotions récentes n'avaient qu'empiré la situation. Trouver un buisson ni trop loin ni trop près et donner à son amie quelque mission à faire afin de l'éloigner le temps qu'elle faisait sa petite affaire.

"Et sinon tu connais bien cet endroit?" reprit-elle, n'attendant pas même la réponse de son amie. "Dis moi pourrais-tu aller chercher ce vieux bourru de guide, il se nomme Kleber, ainsi pourrions-nous de nouveau tenter notre chance auprès de la porte récalcitrante. De ce temps je m'éloigne quelque peu afin de vérifier s'il n'y a pas quelques entrées secrètes ou autres.." Consciente que son excuse était lamentable, elle s'éloigna avec empressement, espérant que Liane en ferait tout autant de son côté.



Trouver un buisson adéquate, tournant la tête de tout côté elle rebroussa chemin et s'éloigna de l'Auberge par le sentier qu'elle avait emprunté. La brise lui porta une odeur qui elle aussi lui apparut familière. Liane? Non celle d'un mâle. Nouvelle hallucination? Se méfiant des tours que pouvait lui jouer la fatigue ou encore un ennemi, elle ralentit le pas et se mit à l'affût de la moindre respiration suspecte.



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