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 Lorsque les rires se turent

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AuteurMessage
Gretel

Gretel
 

Sexe :
  • Femme

Classe :
  • Moine

Age du personnage : 15

Lorsque les rires se turent Vide
MessageSujet: Lorsque les rires se turent   Lorsque les rires se turent EmptyJeu 2 Déc - 3:08

Frrrrrrrrrh.

Je trouvais ce son apaisant. On aurait dit l’écho d’une berceuse, revenu des temps heureux.
Seul le vent et les feuilles de cristal accompagnaient le chant de la lame.

Frrrrrrrrrh.


La lame. Elle remontait lentement le long du bras de cet homme, le caressait, le sillonnait. Je ne la maîtrisais pas ; elle ne voulait pas s’arrêter.
Tout s’accélérait. J’aurais pourtant tant voulu en profiter davantage. Il faut ralentir… stop !

Scrrrr.

Une erreur. Une fausse note. Un rubis sur sa peau blanche. La lame ne bougeait plus.
L’homme grimaçait mais ses paupières restaient closes.

Chuuut… Tout va bien. Rendors-toi. Lui soufflais-je alors à l’oreille.

Le visage de l’homme se détendit alors que le joyau roulait.
Ce moment était parfait ; celui que j’avais attendu si longtemps. Le péché allait être lavé, ma pureté serait rachetée.
Le rubis lâcha prise, sa chute s’achevant par le tintement silencieux d’une perce-neige. Mon cœur fit un bond. Je me penchais alors pour lui chuchoter à nouveau à l’oreille.

C’est le signal des Anges. S’il te plait, reste là, adossé au tronc, et ne te réveille pas. Je ne tiens pas du tout à les voir. Poursuis ton sommeil…

Mes lèvres frôlèrent brièvement son front en un baiser de bonne nuit. La lame avait repris possession de moi.
Ma main se levait pour se positionner entre deux côtes. Si elle tremblait, le froid en était plus responsable que le manque de volonté.
Je ne devais pas perdre de temps, à présent. Prendre le risque d’attendre que le dormeur ne s’éveille eût été fou. Je devais le faire maintenant !

AAAAAAAAH !

Oooooh ! Criais-je alors que j’étais repoussée en arrière, dans la neige. Que c’est beau !

Une fontaine de rubis avait pris source. Dansante, chantante, étincelante.
L’homme, se tordant de douleur, tentait vainement de se relever, inondant la forêt argentée de joyaux qui se déversaient sans cesse, glissant à terre, et que je regardais, amusée.

Pourquoi tu… ?! Tu es… Je te connais ?!

Pourquoi avait-il dû faire cela ? Il venait de tout gâcher. C’était horrible. Ses yeux gris… plongeant dans les miens.

JE NE VEUX PAS LES VOIR ! JE T’AVAIS DIT QUE JE NE VOULAIS PAS LES VOIR ! FERME LES ! FERME LES YEUX ! RENDORS TOI !

La fureur m’emporta et me poussa en avant, sur l’homme.
Ma main était à nouveau incontrôlable. Le poignard plongea à nouveau dans la chair pour la fendre. Une troisième fois. Puis encore une.

Le souffle me manquait. Mon bras tomba alors mollement le long de mon corps. Plus rien ne bougeait.
Ma victime dont les merveilles étincelantes continuaient à s’échapper restait allongée sur le dos, les yeux fixés sur le ciel de coton, marmonnant.

C’est bien toi ? Tu es là ? Tu étais toujours là ? J’ai passé tellement de temps à te chercher. Quel gâchis…


Une larme coulait au coin d’un de ses yeux.

Tu les entends ? Moi non plus. Les rires. Ils ne sont plus là… Mon frère.

C’étaient là ses derniers mots.
Il était mort.
Je l’avais fait. La mission des Anges était accomplie. Mon ultime mission.

Il me restait cependant encore une chose à faire. Mes yeux s’étaient posés sur le vieux sac de toile à côté de la dépouille. Il était bien rebondi. De nombreux secrets y avaient certainement élu résidence. Je devais vérifier ce qu’il contenait. Je devais comprendre qui avait été cet homme. Etait-il aussi mauvais que ce qu'avaient décrit les Anges ?

M’accroupissant à côté du sac, j’y glissai mes mains pour découvrir quelques mystères.

D’abord, un bâton de bois. On aurait dit une branche de chêne. Ordinaire. Aucun intérêt.
Ensuite, des lettres. Beaucoup de lettres. Froissées, mélangées. Signées de la main d’Entrebrume, Galliad, Cypres, Tazouille… des noms qui m’étaient inconnus.
Certaines étaient en meilleur état, reliées entre elles en un petit paquet par un cordon. Grumpy… encore un auteur mystérieux.
Voilà qui promettait d’être intéressant ! Un petit coffret de bois et de métal. Le parfait endroit pour y mettre quelque chose de précieux.
Je tentais de l’ouvrir, mais mes efforts ne servaient à rien. La rouille et l’humidité l’avaient rendu inviolable. Peut-être qu’en le secouant, j’aurais un indice sur son contenu ?
Encore une vaine action. Je n’entendais rien à l’intérieur. Le coffret était vide. Pourquoi avait-il gardé un coffret vide ?!
La fouille était très décevante. Si ce n’est…

Ah ! Voilà qui me plait ! Je peux le garder ? Après ce que tu as fait, ce n’est qu’une modeste compensation...

Je m’emparai alors d’une broche d’argent en tête de loup ornée d’un saphir et gravée aux initiales D .W., la glissant dans ma poche.
J’en avais fini de mon inspection. Il ne me restait plus qu’à mettre un peu d’ordre.
Quand bien même cet homme était destiné aux Enfers, son corps ne pouvait demeurer ici. Je savais quoi faire. Le lac était si beau en cette saison…

Saisissant le cadavre par les aisselles, je le traînai au sol, marchant à reculons en direction du lac.
Il était lourd ; je progressais lentement. J’arrivais pourtant maintenant sur la glace. Des constellations se dessinaient sous mes pieds alors que je continuais d’avancer.

Ici… la glace est plus fine…
Quelques coups de talon au sol eurent raison du miroir terne sur lequel je me trouvais. Un large trou s’était ouvert.
Me penchant sur l’homme que je venais de lâcher, j’entrepris de le faire glisser sur la glace, jusqu’au bord du trou, jusque dans l’eau…

Ce fût sans bruit qu'elle le recouvrit d’une fine couche.
Je regardais le visage du mort, flottant sous la surface de l’eau, tel mon reflet.
La glace reprenait très vite sa place, le recouvrant, et tout se que l’on pouvait voir à présent de lui n’était qu’une silhouette sombre.

Bonne nuit…

Je tournai les talons pour marcher vers la rive.

… papa.
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Grumpy

Grumpy
 

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  • Druide

Age du personnage : 26

Lorsque les rires se turent Vide
MessageSujet: Re: Lorsque les rires se turent   Lorsque les rires se turent EmptyJeu 2 Déc - 22:00

Combien de jours ? Combien de gouttes s’étaient échappées de ma clepsydre ? Des centaines, des milliers.. ? Beaucoup en somme. Mes yeux hagards accompagnaient la longue chute des perles d’eau du haut de leur plongeoir cristallin, se dissimulant sous mes paupières alors que les nacres se brisaient sur le socle de verre une à une. Douleur lancinante, monotone, à laquelle je pensais échapper naïvement comme une enfant en fermant tout bonnement les yeux et en plissant le front. La douleur se faisait d’abord sonorité, puis écho et venait s’immiscer en mon esprit sournoisement. Les tracés malhabiles de mon horloge à eau se dessinaient devant mes yeux clos, et les gouttelettes se teintaient avec hardiesse de multitudes de coloris avant de venir jouer devant moi enchaînant des loopings des plus vertigineux et réchappant de peu à l‘explosion aqueuse en contrebas. Le dénouement était toujours le même, elles me laissaient là, seule comme jamais après m’avoir agrandie un peu plus le trou béant qui ornait déjà ma poitrine.

La lumière se faisait de nouveau, et une nouvelle goutte me souriait avant de s’élancer elle aussi du haut de son promontoire de verre. Que la mort semblait douce. L’avait-elle été pour lui aussi? Sans doute. Était-il mort? A jamais. Dans mon cœur il l’était c’était un fait avéré, seul son fantôme qui se faisait souvenir ne pouvait plus que me narguer de temps à autres. Mais il avait perdu, il n’était plus, lui aussi, qu’une page, que de simples lettres adossées à leurs voisines par un froid glacial d’hiver, lui comme tous les autres ne m’auraient jamais. « Moi, la veuve, l’inconsolée.. » Ma tête se secoua négativement. « Moi la rustre Grumpy. »

« Sais-tu, toi, que si je pleure ce n’est pas de t’avoir perdu mais bien de t’avoir ouvert les portes de mon cœur ? »  Les gouttelettes se paraient de regards et se faisaient miroir d’un passé que je ne pouvais plus que difficilement regarder. Des sourires, des rires, des pleurs, des baisers. Là le soleil brillait, là mes larmes coulaient inscrivant à jamais ton nom sur mes joues. Toi que je n’avais pu caresser que par songes, toi que je n’avais pu que pleurer quand ton heure était venue. Comme lui toi aussi tu avais pris le chemin une matinée de printemps pour ne plus jamais revenir. Vous étiez vous croisé? Et si oui où? Suant et hurlant parmi les flammes ? Ou bien là-haut parmi les étoiles guettant de vos regards d‘homme les décolletés des paysannes œuvrant au champs ? Je me plais à penser que c’est une chopine qui vous aura réuni, sans trop cependant me faire d’illusions.

Homme de cœur, homme de mots. Oui surtout de maux.

Une malicieuse s’étirait de tout son long, refusant de céder sa place à sa consœur qui la suivait de près. Embouteillage aqueux. Soif, je promenais mes doigts en aveugle, brassant le néant. Nul alcool ne me sauverait, elle allait se briser, et dans sa chute elle m’emporterait. Et nous nous écraserons toutes deux, une nouvelle fois, hurlant silencieusement en un unique cri son nom. Mes phalanges se crispèrent, puis mes paumes de main tendues se révélèrent à la lumière, se faisant face de part et d’autre de mon horloge, elles semblaient vouloir retenir l’inconsciente perle, lui susurrer que oui la vie était dure mais que non elle ne devait pas abandonner. Vivre pas pour elle, mais pour eux. Elles se firent entendre, la gouttelette se contracta et referma sa prise sur le rebord. Il était vivant.

Vivant, et pourtant les scènes de sang se multipliaient devant mes yeux, là un soldat du roi lui tranchait la gorge en place publique, là il se mourrait dans une crevasse, là une fillette lui assenait de multiples coups de dague et le traînait vers un lac.. « STOP ! » Je hurlai de douleur mes paumes de main plaquées sur mes yeux furibonds tandis que mon corps se balançait d’avant en arrière.

Elle s’était détachée et filait désormais vers le sol à vitesse vertigineuse. Mes doigts délaissèrent mon front et happèrent le néant avant de se saisir de la clepsydre.

Des perles salées vinrent se mêler à celles de mon horloge, troublant irrévocablement leur file indienne. La douleur éclata, brève mais intense. J’avais repris en main ma vie mais non sans fracas.

Des éclats de verre parsemaient désormais le plancher de ma chambre tandis qu’une tâche grandissait sur les lattes de bois.

« Mafu. »
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